La Drogue -- Qu'en pensez-vous ?

On ne va pas vraiment vous parler de nous, ce serait inutile. Simplement, c’est un sujet qui nous concerne, puisque nous en sommes dépendant. Surtout T, en fait. (Et sans vouloir l’enfoncer, bien au contraire).
Nous, nous avons commencé à en consommer pour suivre Jules, le meilleur ami de Loly (qui lui avait une 'bonne' raison de commencer, il cherchait vraiment le bonheur) . Ainsi, vous vous rendez compte à quel point c’était une raison absurde. On a commencé par les bedos, mais ça ne nous apportait pas assez. Nous n’avions pas assez d’adrénaline, on ne décollait pas.
Alors on a commencé à s’enfermer dans des pièces, pendant des heures, et à respirer la fumée des bedos qu’on rejetait. Très vite, il n’y avait qu’elle, et plus d’oxygène « normal », si on peut dire. Et puis là encore, ce n’était pas assez. Alors on est monté plus haut.
La drogue dure, les seringues, les lignes de coke. Et là, on était bien. Vraiment.
Vous savez, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais Loly emploie souvent trois mots : Liberté, Espoir, Eternité. Eh bien ces trois mots là, nous pouvions les sentir, les toucher. Nous avions l’espoir que tout s’arrange, avec la liberté et l’éternité devant nous.
Et surtout, nous avions le bonheur à porté de main. Et croyez nous, quand on prend nos doses, encore aujourd’hui, nous sommes heureux. C’est la descente, qui est plus dur. Et le manque. Parce que bien évidemment, nous sommes dépendants. Nous, en l’occurrence, nous allons bien. Mais c’est ce qu’on fait subir aux personnes qui nous entourent, qui est plus dur. Parce que comme dit Youyou, nous avons quelques fois des comportements incompréhensibles (et très normaux pour nous), que même Loly ne comprends pas toujours, alors qu’elle passe la plupart de son temps avec nous.
Et vous savez, la drogue, il ne faut jamais commencer. On n’a pas de leçon à donner, vous vous en doutez. Ceci étant, en été, c’est chaud de se mettre en t-shirt, parce qu’on a des bleus dans le coude. Alors on se pique autre part, généralement. Mais alors on s’enfonce encore plus dans ce milieu, et ce n’est jamais bon, donc on évite. C’est dur aussi, de ne pas se couper du monde. A part notre dose, notre poudre, notre pilule, ce n’est pas facile de s’ouvrir aux autres, et de vivre normalement, sans être un camé qui a besoin de ça pour sourire et respirer.
Ensuite, il faut réussir à se contrôler, quand on est censé être « clean ». Et quand on vit avec des gens qu’on ne veut pas décevoir, et qui ne se drogue pas, c’est encore plus difficile. Surtout quand c’est le petit ami de, ou le grand frère de, voyez-vous. Quand on est en trip, aussi. C’est impressionnant, parait-il, et on est souvent incontrôlable, ou au contraire comateux. Et pour finir, s’en procurer, qui est loin d’être facile pour tout le monde. Nous, on a pas ce problème là, il n’empêche que c’est crucial, dans ce monde là.
Maintenant, il est vrai que certaines personnes croient avoir besoin de ça, pour se faire accepter dans un groupe. Ce qui est faux. Loly ne s’est jamais drogué, et pourtant elle est notre petite sœur, notre meilleure amie, et pour un certain monsieur, the petite copine. L’exemple concret, donc. C’est encore plus absurde de tomber là dedans pour prouver quelque chose, parce que oui, il n’y a pas plus faible. Quoi qu’on puisse en dire, la drogue, c’est une échappatoire, à la base. Un moyen de s’échapper de la réalité, de voir des belles couleurs, de toucher des sons, de se sentir invincible, fort, meilleur.
Mais ça ne dure jamais. On a plusieurs années de pique derrière nous, et on peut vous le dire, les effets ‘positifs’ sont toujours là. Les négatifs encore plus.
Et le plus dur, c’est de se sentir heureux qu’en s’en injectant. L’excitation, la liberté. C’est se sentir faible quand on est sobre, et se croire fort quand on est sous son emprise. Parce qu’on ne peut pas s’en défaire.
Et puis pour finir, le plus dur, je crois, c’est les personnes proches, qui doivent subir nos changements de comportements. S’adapter, se taire, pour ne pas énerver l’autre, pour qu’il puisse se contrôler, et être heureux. On ne pourra pas bien s’étendre sur ce sujet là, car il faudrait détaillé, et je doute que Loly soit réellement ok pour ça, et surtout, que ça vous intéresse. Voilà. Maintenant, un bedo par ci, par là, croyez nous, ce n’est rien. Et on ne tombe pas dépendant avec ça, lol ! Mais surtout, ne pas aller plus loin. Vraiment pas.
Vous savez, quoi qu'on en dise, les drogués sont égoistes. Parce qu'on fait beaucoup de mal, autour de nous. Et même si nous avons l'illusion d'être heureux, l'euphorie retombe bien vite, dans le regard de ceux qu'on aime. On était là, pendant l'overdose de J. On l'a vu relevé sa manche, on l'a vu trembler, on a vu l'exitation dans ses yeux. On l'a vu planté l'aiguille, s'allonger, et respirer. Et on a vu les premiers effets, les seconds. Et on l'a vu repartir sur un brancard. Alors voyez-vous la drogue, ça n'apporte pas toujours le bonheur.